mercredi 28 février 2018

Ferdinand Hodler, l'oublié

La Suisse célèbre cette année le centenaire de la disparition d'un de ses grands peintres symbolistes, Ferdinand Hodler (1853-1918). 


Sa grande toile (116x299cm), la nuit (1891) est sans aucun doute la plus célèbre de ses oeuvres. Elle est également celle qui consacre l'artiste et lui assure sa renommée internationale. Hodler se représente nu, allongé, au centre, attaqué par un spectre noir, la mort. Autour, on le retrouve à nouveau endormi auprès de femmes. Les couleurs atones et le rythme des formes donnent une impression minérale assez glaciale. L'ordonnancement de ces formes est marqué par une certaine symétrie mais plus encore un parallèlisme (principe de composition formelle mais également philosophique, la nature aurait un ordre, une harmonie).
Le tableau fait scandale car l'artiste se représente en compagnie de sa femme et de sa maîtresse. Mais il permet au jeune peintre de côtoyer, l'un des chefs de file du symbolisme, Puvis de Chavannes.


Qui est Hodler ?
Né en 1853 à Berne, issu d'une famille modeste, Ferdinand est orphelin à 14 ans. Sa formation est d'abord artisanale. Il arrive en 1871 à Genèves et devient l'élève de Barthélémy Menn, ami de Corot. Ses premières oeuvres sont marquées par l'influence des peintres réalistes (dont Courbet), on retrouve des portraits, des scènes de la vie quotidienne. La critique dénonce en lui (comme pour les autres peintres réalistes), le peintre de la laideur.
Sa peinture va alors évoluer au milieu des années 1880. Il fréquente les premiers cercles symbolistes de Genève, lit Mallarmé et Verlaine. C'est alors qu'il adopte l'un des thèmes de prédilection des symbolistes, la mort. Son père et ses cinq frères emportés par la tuberculose ont sans doute marqué l'artiste. La mort devient récurrente dans son oeuvre, le vieux charpentier fabriquant un cercueil, des vieux hommes assis, les fatigués, de vieux hommes dans des linceuls résignés à leur condition de simple mortel dans Eurythmie.

                                     Eurythmie (1895)

Hodler devient un peintre reconnu surtout en Europe centrale. Les commandes se multiplient, on lui propose de décorer la façade de l'exposition nationale suisse de 1896, l'université de Iéna ou encore l'Hôtel de ville de Hanovre. En 1904, il est l'invité d'honneur des peintres de la Sécession de Vienne (patrie de Klimt). Son succès dans des œuvres monumentales ne l'empêche pas de poursuivre son travail de portraitiste (influencé par l'expressionnisme) et de paysagiste.
Ces derniers représentent le plus souvent sa Suisse natale, les montagnes (dans une symétrie...qui flirte parfois avec l'abstraction). Quant aux arbres et aux paysages, ils sont teintés d'un japonisme encore à la mode à cette époque (par ex : la pointe d'Andey).




















Cerisier en fleur (1905)                                 Le lac de Thoune aux reflets (1904)

                                         La pointe d'Andey (1909)


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Le bûcheron (1910)

Sa palette va s'éclaircir avec le temps, elle prend des couleurs, celle des fauvistes. Son autoportraits aux roses (1914) en est un bel exemple.














Autoportrait aux roses (1914) Portrait de Gertrud Muller (1911)




Avant de mourir, en 1918, Hodler fait la démonstration que le légendaire neutralisme suisse n'est pas un atavisme national. Puisqu'il signe en 1914, une pétition contre le bombardement de la cathédrale de Reims par les Allemands. Il est du même coup, exclu et boycotté des sociétés artistiques allemandes auxquelles il appartenait, ces tableaux sont décrochés des musées.

Concluons en citant l'artiste
"Si j’avais encore cent ans à vivre, je continuerais à exprimer les accords, les harmonies de l’humanité. "




Pour aller plus loin :
Un article sur le site du musée d'Orsay
La collection en ligne du musée d'art et d'histoire de Genève : plus de 1000 images


Jean-Christophe Diedrich

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