New-York est-elle encore une grande capitale de l'art ? A voir la quantité de galeries dans l'Upper West Side, on pourrait s'en convaincre....Une à côté de l'autre de la 23è à la 25è rue, on retrouve des façades en briques et à l'intérieur de vastes espaces vides aux murs blancs mais surtout un accueil distant d'un personnel branchouille, collé derrière un Mac....bref, ambiance moyenne !
Mais il faut reconnaître que la concentration de près de 150 galeries exposant beaucoup de jeunes artistes de tout horizon donne envie de faire son marché.....Encore faut-il avoir un peu les moyens.
La Betty Cuningham Gallery expose ainsi une artiste noire déjà confirmée, tout au moins aux Etats-Unis. Bervely McIver est née en 1962 en Caroline du Nord. Elle n'est pas issue d'une famille aisée et a décidé depuis longtemps de se concentrer sur l'exercice difficile du portrait. Elle peint les membres de sa famille mais aussi des autoportraits.
1- Présentation de l'oeuvre
Titre : Can you hear my Silent Scream ?
Support : huile sur toile
Dimension : 38,5 x 40,5 pouces
Auteur : Beverly Mciver
Beverly McIver est née en 1962 à
Greensboro, en Caroline du Nord.
Elle étudie l’art à la North Carolina Central University, puis à la Pennsylvania State University où elle obtient une maîtrise,
et un doctorat à la North Carolina Central University. Elle est actuellement professeur en Caroline
du Nord. Son travail a souvent
été récompensé. Son travail tourne
autour du portrait,
une peinture figurative aux couleurs vives. Elle utilise comme modèle ses proches qui l’inspirent beaucoup.Son autre grand sujet
est son propre
visage qui
n’échappe pas à des représentations sans concession.
2- Description
Une partie d'un visage d'une femme noire est représentée bouche ouverte. La posture est pour le moins peu
académique. On remarque immédiatement qu'au milieu du visage les lunettes offrent un
jeu de reflets qui double le regard et le reste du visage. Une sorte de répétition, de dédoublement apparaît au milieu du tableau. Une phrase à peine
visible traverse également le visage : Can You Hear my silent Scream….qui est en fait le titre du tableau.
Composition
Un visage débordant du
cadre renforce l'impression de gros plan, d'un effet zoom. Le fond
est alors presqu’inexistant. Alors que les épaules sont à peine esquissées au bas du tableau.
Les couleurs / la lumière
Les couleurs dominantes
sont le marron et les différents dégradés. Le blanc des dents, du chemisier,
des yeux rehausse l'ensemble et rythme la composition. Le fond passe du vert à
gauche à un bleu réchauffé par quelques touches jaunes et oranges
La lumière provient du
devant, effet flash. Mais le jaune à l’arrière de la tête laisse deviner une
autre source de lumière.
3- Analyse et
interprétation
Il est toujours difficile
de proposer des interprétations sur une œuvre de portrait. Cependant, les visages racontent souvent des
histoires. L’artiste peint sa sœur
Renée qui est handicapée mentale et qui depuis le décès de leur mère est sous sa
tutelle légale.
Bervely multiplie alors les portraits
de sa sœur comme un sujet récurent et obsessionnel mais aussi et sans doute comme une forme de militantisme pour
faire accepter le handicap. Elle a par ailleurs
réalisé un documentaire sélectionné aux Oscars.
Le titre du tableau interpelle le spectateur. Renée a des choses à dire, qu’elle pourrait crier mais le
handicap empêche souvent la communication avec les autres. L’artiste à travers cette
image donne la parole à sa sœur et laisse exprimer une certaine révolte : un Cri de Munch, version
US…
4- Œuvres et artistes à relier au travail de McIver
Ce qui peut relier l’œuvre de MacIver à d'autres artistes comme la romancière Toni Morrisson ou la photographe La Toya Ruby Frazier, c'est la volonté de témoigner de la souffrance de la communauté noire américaine et des femmes en particulier.
Bervely Mciver ne semble pas devoir s'arrêter à ces très bons portraits réalistes et expressifs, d'autres œuvres tendent à montrer que son talent a bien d'autres facettes, les visages grimés de ces derniers portraits, des scènes de la vie quotidienne, des œuvres plus marquées par la détresse sociale sont autant de pistes pour un travail qui tend à gagner en intensité et en profondeur.
Jean-Christophe Diedrich